…toutes les feuilles tombent, et mon cœur pleut des larmes loooongueeeuh… chantait à tue-tête la cassette des P’tits Loups du Jazz (et moi avec) quand jadis, la voiture nous menait vers les vacances. Je profite des miennes pour partager avec vous ces neuf haïkus de saison. J’ai ajouté un petit topo sur cette forme poétique à la fin de l’article pour ceux qui veulent en savoir plus. 🙂
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Fenêtre entr’ouverte ;
Glisse sur les feuilles assoupies
Le swing d’un piano
Matin : l’air urbain
Encore frais boit le soleil
Seule dans la rue !
Un parc gris-roux…
Le brouillard a étouffé
Mon soupir d’adieu
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Nos pas engloutis
Brisent le silence :
Les hêtres sont presque nus
Oh ! La fougère aigle
Un pétiole rouge sang
Sous les limbes ternes
Les grues qui transitent…
A chaque coup d’ailes s’envole
Un peu mon chagrin
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Il a réveillé
Le jardin juste couché
Petit rouge-gorge
Châtaignes brûlantes
Les flammes tressautent
Au rythme des notes bleues
Volets en suspens ;
Encore un peu dehors pour
Regarder la nuit
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Quelques précisions sur le haïku
Le haïku est une forme poétique japonaise datant du XVIIe siècle. Elle vise à retranscrire de manière très concise une émotion passagère, un moment qui étonne ou émerveille. Il s’agit de capturer l’instantané – un peu comme le fait la photographie, finalement.
Le haïku classique obéit à des règles de composition très strictes, dont voici les plus importantes :
- Il doit contenir dix-sept syllabes, en trois vers (5-7-5)
- Il doit y avoir une césure à la fin de la première ou de la deuxième ligne (le haïku ne doit pas être une seule phrase)
- Une référence à une saison (ou au moins à un événement naturel tel que la pleine lune) doit apparaître
Les haïkistes modernes prennent souvent quelques libertés par rapport aux règles ancestrales et je ne m’en suis pas privée. Certains de mes poèmes sont d’ailleurs plus proches du poème minimaliste que du haïku : en particulier, le « moi » ne devrait pas apparaître en tant qu’acteur de la scène – il peut cependant être observateur.
Par ailleurs, les haïkus français diffèrent forcément des haïkus japonais. Ceux-ci se basent beaucoup plus sur les noms et les onomatopées. Il existe plein d’onomatopées rigolotes en japonais… Par exemple, pour dire « eau qui se soulève en vagues », il suffit de dire : jabu-jabu. Ça fait des syllabes en rab’, tout de suite. En plus, la langue japonaise comporte beaucoup d’homonymes, comme elle possède peu de sons différents. Et par-dessus le marché, elle n’utilise pas d’articles (seul le contexte indique si le nom est au singulier ou au pluriel). Tout ceci permet de créer de l’ambiguïté et de jouer avec les mots plus facilement qu’en français en un poème aussi court.
En tout cas, japonais ou pas, écrire un haïku est une expérience inspirante pour qui est sensible aux petites flèches d’émotion du quotidien (et pour qui aime la photographie – Roland Barthes en parle très bien dans La Chambre claire) !
donc tu as lu la chambre claire ??? bravo pour ton érudition ! et punctum ou pas punctum, tes photos sont toujours sublimes.
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